Leïla Martin est une âme inspirante, lumineuse et ambitieuse. Un tel parcours vaut le détour : dès ses débuts, elle a su se donner les moyens de réussir et ce dans divers domaines. Le journalisme, l’écriture, l’univers culinaire, la communication et bien plus encore… Ce chemin de vie a été jalonné de rencontres marquantes et d’opportunités qu’elle a su saisir. Polyvalente, elle ne cesse de mettre en lumière notre patrimoine culturel alsacien !
Pour commencer, je te propose de te présenter comme tu le souhaites en quelques mots ?
Pour être honnête, il n’est pas aisé de se présenter en quelques mots seulement. Je dirais que j’aspire avant tout à créer du lien et des émotions à travers la cuisine. De plus, la défense du patrimoine culturel alsacien me tient énormément à coeur.
Et puis, j’ai plusieurs cordes à mon arc désormais : la cuisine, la communication, la rédaction, la création d’événements… Mais le tout tourne autour de la cuisine alsacienne et de cet univers que j’ai créé.
Lorsque tu parles d’univers, qu’est-ce que tu entends par là ?
Une cuisine généreuse et audacieuse. Une cuisine qui permet de valoriser toutes les richesses que nous détenons en Alsace : ses talents, ses artisans, ses producteurs ainsi que tout ce que notre sol fait pousser. En somme, toutes nos ressources. L’Alsace sans frontières me plait énormément.
Après avoir parcouru ton univers, j’ai pris note du fait que tu associes la « fourchette » et la « plume ». Je serais ravie de savoir si tu as découvert ces passions simultanément ou non ? Je suis moi-même une grande passionnée d’écriture depuis toute petite !
Justement, j’ai commencé à écrire lorsque j’étais toute jeune et notamment de la poésie. Si tu aimes l’écriture, il est important de cultiver cette passion ! Cette passion pour l’écriture m’a d’ailleurs amenée à être pigiste pour les DNA à l’époque. Je devais avoir 21 ou 22 ans.
J’y suis allée comme ça, au culot. J’étais alors apprentie et je finissais mes journées assez tôt. Je me suis dit : comment occuper mes soirées après 16 heures ? J’ai ainsi envoyé une lettre de motivation et le rédacteur en chef m’a reçue en entretien. Le jour même, il m’a donné des missions pour le lendemain. J’ai réalisé mon premier portrait : celui d’un peintre qui exposait à Riquewihr. Le lendemain, mon portrait était publié dans le journal !
C’est incroyable ! C’est allé si vite. Tu n’as pas eu peur ?
L’envie était plus forte que tous les freins.
Est-ce que le métier de pigiste t’a immédiatement plu ?
Oh, j’ai même adoré ! Cette profession m’a permis de rencontrer des tas de personnes dans des domaines très différents.
J’ai pu écrire sur plein de sujets… La rédaction permet d’alimenter sa propre culture et de comprendre des écosystèmes dans lesquels on ne navigue pas forcément. C’est super intéressant.
Je te rejoins sur l’écriture et la rédaction… J’imagine qu’avec un tel parcours de vie, tu as eu une ou des rencontres qui ont changé ta manière de voir les choses, qui t’ont permis de déployer ton savoir-faire, tes ambitions ?
En vérité, mon histoire a réellement commencé avec les Éditions La Nuée Bleue. Je leur ai transmis un roman. Je crois que c’était en 2002. Suite à cela, le rédacteur en chef a tenu à me rencontrer et le roman est tombé aux oubliettes. Cependant, cela m’a permis d’écrire pour le magazine Saisons d’Alsace !
Je suis ainsi tombée dans la cuisine : en interviewant des chefs alsaciens. Comme tu le vois, une passion a débouché sur une autre.
Cette rencontre avec La Nuée Bleue a été décisive pour moi. En effet, si je n’avais pas eu ce geste de me dire « Ça y est, j’envoie un manuscrit et je verrai où cela me mène », peut-être que la porte ne se serait jamais ouverte et je ne serais peut-être jamais devenue cheffe !
C’est l’effet papillon, je crois… La vie est surprenante !
Je ne sais pas, les hasards de la vie et des rencontres font que parfois, un élément déclencheur bouleverse le cours d’une existence. Peut-être que j’avais toujours cela en moi mais qu’il a fallu cet élément-là en particulier pour que tous les astres s’alignent et que je parvienne à développer cette envie profonde…
Et, as-tu toujours été intéressée par la cuisine avant cela ?
Oui, j’ai toujours aimé ça. Petite, j’étais déjà une grande gourmande : je cuisinais avec mes parents, ma grand-mère…
Ce que je retiens de cette rencontre marquante : il faut oser, dans la vie !
Oui, il faut oser quand on a une envie qui nous tenaille et qu’elle semble plus forte que tout. Il ne pas hésiter à bousculer des barrières, à frapper à certaines portes et si la porte ne s’ouvre pas… passer par la fenêtre !
Car c’est en multipliant les rencontres que l’on se crée des opportunités.
Tu as donc cette fibre d’autodidacte en toi. Comment le ressens-tu ?
À mes yeux, être autodidacte est souvent une force. En tout cas, pour moi ça l’a toujours été : que ce soit dans la cuisine ou dans le journalisme. Être autodidacte permet d’avoir un regard singulier et différent de celui de quelqu’un qui a été formaté et il faut en faire une force !
Tu as raison… Et, rien n’est figé. On peut toujours changer d’horizon !
Jamais ! Encore moins quand on est jeune… Tout est possible, on a encore plus de temps devant soi pour expérimenter et pour changer. Dans une vie, on peut beaucoup évoluer. Souvent, on se dirige vers un diplôme quand on est jeune et puis finalement on se rend compte que l’on a plus d’affinités dans telle activité ou tel domaine spécifique. D’ailleurs, les entreprises sont de plus en plus enclines à favoriser la personnalité, l’envie, la curiosité.
Qu’est-ce qui t’a poussée à te lancer dans l’entrepreneuriat?
Je n’étais pas faite pour être salariée dans une entreprise classique avec des codes où l’on t’embauche mais on te coupe les ailes. On veut tellement te canaliser que l’on te coupe tout ton potentiel. J’ai réellement été en souffrance dans ce monde là. Cela m’a poussée à voir le monde autrement et à créer ma propre entreprise.
Il ne faut pas non plus oublier qu’un tel parcours se construit sur des années avec un travail colossal. Mais, tout est possible !
J’ai l’impression que tu as su t’écouter et faire les meilleurs choix pour toi… C’est très inspirant !
Je suis la preuve vivante qu’en suivant ses intuitions et ses envies, rien n’est impossible ! J’en suis convaincue. Il ne faut ni avoir honte, ni se réfréner… Juste se dire que si l’on a une envie puissante, celle-ci nous donne en général suffisamment d’élan pour essayer. Souvent, ce sont les rencontres qui font toute la différence.
En vérité, avec tout ce que tu m’as raconté depuis le début de notre échange, j’ai la sensation que ta vie s’apparente à un film !
Je dirais que ma vie a été faite de rencontres et d’opportunités. J’y suis allée au culot pour beaucoup de choses. Souvent, on a l’impression d’enfoncer des portes ouvertes mais.. qui ne tente rien n’a rien ! Quand on ose, la vie nous sourit.
L’important, c’est de parvenir à concilier toutes ses passions, je crois. D’ailleurs, tu as lancé ton blog « Je vais vous cuisiner » en 2014. Quelle importance donnes-tu à ce blog ?
Le blog a une importance cruciale pour moi. En effet, il m’a aidée à concilier toutes mes passions. Grâce à lui, j’ai continué à écrire, à faire des rencontres grâce aux portraits et j’ai pu expérimenter la cuisine !
Il y a toujours eu pléthore de blogs culinaire. Quels conseils donnerais-tu à une personne qui souhaite se lancer ?
En effet, il est légitime de se poser la question suivante : comment se démarquer et comment exister dans cette jungle du web ? Mais, ce n’est pas une mission impossible : il faut trouver sa niche, trouver sa vache pourpre. Notre vache pourpre, c’est ce qui va faire que notre univers va émerger car il sera particulier, il sera le nôtre spécifiquement.
Il est primordial de brainstormer sur ce qui nous caractérise nous. Il faut se différencier de ce qui existe aujourd’hui : pour cela, pourquoi pas passer par une phase d’écriture pour savoir qui l’on est, ce que l’on souhaite apporter au monde : notre WHY et notre HOW. En somme, ce qui nous motive au plus profond de nos tripes !
Comment cette aventure a commencé ? Et, comment as-tu réussi à te démarquer ?
J’ai commencé mon blog dans une période où je n’avais pas réellement de temps puisque j’étais jeune maman. À l’époque, un ami de mon mari a souligné mon talent « extraordinaire » selon ses dires pour la cuisine. Suite à cela, il m’a incitée à partager cette passion par le biais de l’écriture. Mais, je me suis dit : comment trouver le temps ?
Puis, un jour il est venu et m’a dit : ça y est, j’ai créé ton blog. Au début, j’ai appelé cette plateforme « Je vais vous cuisiner » car j’adore l’exercice du portrait. De plus, je n’avais pas très envie de parler de moi car mon univers culinaire n’était pas encore abouti comme aujourd’hui.
Je pensais me démarquer des autres en réalisant un portrait d’une personne et en racontant ce portrait à travers sa recette fétiche. Néanmoins, l’idée de base et la réalité étaient drastiquement différentes. En effet, le projet prenait deux jours ! Réaliser la recette avec la personne, rédiger le portrait, prendre les photos… Je manquais de temps.
J’ai donc choisi de poster des recette du quotidien pour ne pas laisser mon blog vacant. Ce qui me différenciait était les choses suivantes, je pense :
- La notoriété que j’ai gagnée grâce au concours Chefs à bord,
- La manière dont je racontais les choses qui plaisait.
Tu n’avais donc pas encore réellement trouver de ligne conductrice à ton blog au tout début. Qu’est-ce qui t’a poussée à en faire un réel outil « professionnel » ?
En effet, je n’avais pas encore de ligne directrice. Et puis, un jour, j’ai réellement voulu faire de blog une vitrine, un outil professionnel. Je me suis posée et j’ai fait une sorte d’introspection en me posant la question suivant : qu’est-ce que je veux raconter à travers la cuisine ?
Quelle fut ta conclusion ?
Je tenais avant tout à raconter l’Alsace, ma région, les produits du terroir, l’importance du locavore et du respect des saisons. Je voulais essayer de donner une toute autre couleur à mon site… et puis, ça a explosé !
Revenons-en à la cuisine, justement… Que penses-tu de la cuisine à l’heure actuelle ?
La cuisine est un dénominateur commun pour beaucoup de personnes. Même pour celles qui n’aiment pas trop cuisiner… Désormais, il y a une certaine mouvance : un retour aux choses naturelles, plus ancrées. On retourne à l’essentiel.
La cuisine est sans doute un prétexte, mais pour moi, c’est un réel moyen de fédérer et de créer du lien. C’est un moyen de rassembler des gens autour d’un moment de partage.
La cuisine pour toi, c’est donc un réel moyen d’enjoliver sa vie ?
La cuisine peut réellement transformer le quotidien et embellir une existence. Regarde les couleurs, par exemple : c’est une manière de savourer avec les yeux avant de savourer avec les papilles. Toutes les hormones s’éveillent quand on déguste et que l’on a du plaisir. Le bien-être est à la fois dans le côté nutritif et dans le côté émotionnel. Les deux aspects sont importants pour moi.
Est-ce qu’il t’arrive d’avoir la « flemme » de cuisiner ?
Cela m’arrive d’avoir la flemme de cuisiner mais même dans ces cas-là, pour moi, passer à table doit être un moment de plaisir. Et ce, même si c’est très simple : un très bon pain et un très bon fromage ou une bonne salade !
Savourer son repas, c’est crucial, pour toi ?
Je déteste manger pour manger. Pour moi, c’est sacré. Je préfère ne pas manger du tout… Passer un bon moment autour de la table en famille est important pour moi.
J’ai l’impression que le « bonheur » est une valeur que tu implémentes dans ta vie de tous les jours et dans ton travail, non ?
Le bonheur ? Non, c’est un bien grand mot… Chacun y met quelque chose de différent. Je dirais que la joie est un concept beaucoup plus fort. Effectivement, le bonheur est souvent perçu comme quelque chose d’extérieur à ce que l’on vit, tandis que la joie, on peut la cultiver.
Le bonheur, c’est un état auquel on adviendrait en ayant traversé diverses épreuves… Pour moi, la joie se cultive et c’est une chose qui en implique plein d’autres : ne pas être aigrie dans son coeur, aimer, partager, être nourrie de bienveillance, voir le bon côté des choses… C’est un concept plus fort, plus complet.
As-tu toujours été aussi optimiste, ou ça vient avec l’âge ?
Ah ! Je pense que cela vient avec les expérimentations. Plus on avance, plus on sait qui l’on est, ce dont on a envie, ce dont on a besoin. Voici l’un des bénéfices de l’âge : savoir ce que l’on veut et ce vers quoi on veut aller.
Mais, j’aimerais savoir : comment arrives-tu à gérer ton temps avec autant de projets en parallèle ?
Oh… Le planning est une question épineuse. Je fais plein de choses différentes en effet et j’ai besoin de structurer mon temps, rationaliser la manière dont je travaille. On a vite fait de se « cramer » lorsque l’on est passionnée et que l’on veut aller dans tous les sens.
Puis, avec deux enfants, je dois trouver l’équilibre entre mon travail d’entrepreneuse et mon rôle de maman.
À ce sujet, as-tu une journée « type » ? Gères-tu tout toute seule ou as-tu de l’aide ?
La « journée type » dépend beaucoup des prestations que j’ai. En ce moment, on me sollicite beaucoup pour des événements et notamment des prestations traiteur.
Alors, oui, j’étais seule jusqu’ici ! Mais nous sommes 4 désormais :
- Marie-Laure est mon bras-droit. Elle m’aide sur tous les fronts depuis le début du mois de mai,
- Hugo est un alternant avec qui je fais des vidéos depuis février dans l’entreprise,
- Et Zoé qui rejoindra l’équipe en septembre pour l’aspect communication sur les réseaux sociaux.
Cela va m’aider à structurer les choses et à gagner en efficacité !
Parmi les axes autour desquels tu travailles, peux-tu m’en dire plus sur la communication gourmande et les accompagnements ?
La communication me demande beaucoup de boulot en plus mais c’est également un moyen de vendre des prestations derrière. Je la pratique depuis plus de 25 ans. En ce sens, c’est un réel atout pour proposer aux entreprises de l’agro-alimentaire des stratégies de contenus efficaces avec en prime aujourd’hui la visibilité offerte par mon blog et les plus de 100 000 followers de mes réseaux sociaux.
Tu as appris seule ?
J’ai un gros passif de communicante. J’ai bossé quelques années en agence de communication avant de créer ma première entreprise de conception-rédaction à l’âge de 26 ans. Une aventure qui a duré près d’une dizaine d’années.
Quel est ton secret pour rester jeune et dynamique ?
Je dirais : ne jamais avoir le sentiment d’être arrivée mais avoir le sentiment que tout est encore devant. La vie est belle pour peu que l’on s’en donne les moyens.
J’aime cette manière de voir les choses ! D’ailleurs, as-tu une devise qui te guide au quotidien ?
J’en ai plus d’une. Tout d’abord, je dirais que rien n’est impossible. Lorsque l’on met de l’amour, du coeur et de la joie dans ce que l’on entreprend, on peut soulever des montagnes !
J’ai une forte envie de cultiver la joie au quotidien. À travers ce que je fais sur les réseaux sociaux, j’espère offrir du divertissement, de la joie et du bien-être. J’ai envie d’être un petit rayon de soleil dans la journée des gens. C’est pourquoi j’utilise beaucoup l’humour dans mes publications afin d’offrir des moments de joie.
Tu m’as apporté beaucoup de joie au cours de cet échange, en tout cas ! Merci beaucoup. Pour finir, voici une question incontournable S’Bretzel : comment manges-tu ta Bretzel ?
J’adore manger ma bretzel avec un bon verre de bulles. J’adore les bretzels ! C’est simple, mais si bon. Ça fait toujours plaisir… La Bretzel est dans mon Top 5.
L’Équipe S’Bretzel remercie grandement Leïla Martin pour cette discussion et ce moment de partage. Nous vous invitons à la suivre sur ses réseaux sociaux !